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Ardent de s'élever

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Message  Blayn Kelsen Mar 19 Nov - 12:45

Un jour particulier aujourd’hui au manoir : c’était le jour où l’héritier du comte arrivait. La maisonnée s’affairait, on préparait les linges, on montait des bassines d’eau… le comte lui-même restait devant la porte, ses yeux bleus braqués sur celle-ci, impassible, tandis qu’une servante réprimait difficilement sa nervosité.

Il resta à attendre, réajustant de temps en temps son pourpoint écarlate brodé d’or et de noir ou passant une main dans ses cheveux roux pour masquer une certaine appréhension.
Une autre servante sortit alors, les larmes aux yeux.

Le cœur du noble se serra : ce serait au moins la cinquième tentative, les autres ayant lamentablement échoué à diverses étapes. Le dernier essai avait tenu jusqu’à l’accouchement, mais le bébé était mort, et la mère avait failli faire de même.

C’en était à désespérer.

« La Lumière soit remerciée ! Il est vivant, monseigneur ! Un peu maigre ! Mais il respire ! » s’exclama-t-elle, les larmes se révélant être de joie.

Un garçon alors. Parfait. Ce serait une des rares bonnes nouvelles depuis l’édification du Mur.
Il rentra, tandis que la servante lui tenait la porte, et regarda l’enfant tout juste né, qu’on lui tendait. Il l’attrapa et le détailla plus précisément. Pleurant, hurlant, rouge, chauve : un bébé comme un autre, avec ses yeux bleus, ses cheveux éparses, encore trop clairs pour en déterminer la couleur. Sa seule caractéristique était effectivement d’être un peu moins potelé que la moyenne. Il ressemblait presque à celui de la dernière fois…
Il sourit alors, avant de regarder sa femme, exténuée.

« Je veux le voir de plus près. » dit-elle.
Il fronça les sourcils, puis le lui tendît, se détournant dès qu’elle l’eut pris dans ses bras, sans un regard. Avant de sortir de la pièce, il dit simplement :
« Profitez bien des mois qui vont suivre, vous le verrez beaucoup moins après ceux-ci. »



Ces mois passèrent vite.
Le comte ne se penchait que rarement sur les sentiments, les siens comme ceux d’autrui.
Il occupait son temps à traiter des affaires du domaine, de plus en plus compliquées comme la manufacture de voitures à cheval et autres carrosses avait une partie de sa clientèle de l’autre côté du Mur, inaccessible désormais et laissant donc la production à son minimum vu le peu d’offre disponible. A l’inverse, les cultures et prés avaient des rendements insuffisants face à la demande croissante.

Et son fils. Il présentait un caractère des plus effacés, incapable de s’affirmer.

Il grimaça. Cet enfant ne serait pas une déception. Quels que soient les moyens, ce garçon deviendrait le digne héritier que lui-même méritait, que sa famille méritait. Ou alors il pourrait toujours essayer d’en avoir un autre…
Il secoua la tête pour lui-même. Non, celui-ci était déjà un miracle, et la Lumière sait que les miracles sont rares.

L’homme laissa son regard impassible quitter doucement l’horizon et se retourna vers son fils qui, souriant, regardait les environs en suçotant son pouce. Il lui indiqua de le retirer de sa bouche par un bref claquement de langue exaspéré.

L’enfant se reprit aussitôt, avant de questionner, tout en mettant nerveusement un peu d’ordre dans sa tenue :
« Père ? P-p-p-pourquoi les serviteurs ont… ont… ont… »

Par-dessus tous les défauts que cette loque qui lui servait de fils présentait, le pire était encore ce bégaiement constant et ses hésitations insupportables.

« Parlez. Je vous écoute… »
« P-p-p-pourquoi… p-p-pourquoi les serviteurs ont de m-m-m-moins b-beaux vêtements et… p-p-p-p-pourquoi est-ce que ce s-s-sont eux qui… servent… ? »
« Parce qu’eux et leurs ancêtres n’ont pas fait preuve de suffisamment de mérite, voilà tout. »
« Ai-ai-ai-ai j-j-j-je du m-m-m-m-mérite moi ? »
« A part celui du sang, non. Pas une once. Vous ne méritez rien de tout ce que vous avez. »

Il toisa froidement son fils, pendant que le vent sifflait dans les rares arbres tout autour de la propriété. Celui-ci acquiesça finalement avec un semblant d’air grave.

« Maintenant allez vous préparer. Le maître d’arme que j’ai fait venir de la capitale pour vous arrive aujourd’hui. Faites en sorte de mériter. »

L’enfant se détourna après une brève inclinaison de la tête, marchant vers le manoir. Son père esquissa un faible sourire : au moins il restait suffisamment malléable pour le rendre convenable.

Toutefois ce n’était pas assez.

C’était au moins la dixième fois qu’il lui assénait ce discours. Sans succès. L’enfant restait la plupart du temps prostré dans un coin, rêveur ou amorphe, qu’importe. Evidemment il s’inquiétait pour lui, puisque malgré tout c’était son sang qui coulait dans ses veines.

Mais si ce fils continuait sur cette voie, il finirait par nier ce lien du sang.

De gré ou de force, il en ferait quelque chose.
Blayn Kelsen
Blayn Kelsen

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